Transmis par DAC
18.05.09 LT - Alexandre Ris, Senior product manager Pictet Funds : Améliorer les rendements et la diversification avec les marchés émergents. Faible risque de défaut et asymétrie du risque au profit de l’investisseur parlent pour la dette émergente en dollars.
Nettement mieux armés structurellement que dans les années 1990 pour affronter le ralentissement conjoncturel, les pays émergents bénéficient en outre du soutien des grandes organisations internationales. Excellent vecteur de diversification pour les investisseurs privés et institutionnels, la dette émergente en dollars figure ainsi dans les classes d’actifs aux potentiels de rendement très prometteurs dans un horizon de douze à dix-huit mois.
Contrairement à la situation qu’ils ont vécue il y a une dizaine d’années, les pays émergents connaissent actuellement une évolution fort semblable à celle des économies industrialisées. Ils sont en effet frappés par la même crise conjoncturelle, et voient le rythme de progression de leur produit intérieur brut (PIB) s’affaisser, en raison principalement du ralentissement de leurs exportations vers les pays développés. Cependant, l’impact conjoncturel apparaît moins marqué cette fois-ci, en raison des nombreuses réformes structurelles que ces pays ont entreprises ces dernières années et qui commencent à porter leurs fruits. Ils ont largement œuvré à l’indépendance de leurs banques centrales respectives, à la maîtrise de leur inflation, tout comme à l’équilibre budgétaire et à la constitution de réserves de change. De plus, bon nombre d’entre eux, comme le Brésil ou encore la Chine – qui a annoncé un plan de relance de près de 600 milliards de dollars – ont pris d’importantes mesures pour stimuler la demande intérieure et diminuer par là même leur exposition aux exportations.
Les économies émergentes sont aujourd’hui ainsi beaucoup mieux armées face à la crise et peuvent par ailleurs compter sur le soutien des grands organismes internationaux. Un seul exemple: le Fonds monétaire international (FMI) dispose de 750 milliards de dollars pour venir en aide aux pays les plus fragiles, alors que la valeur de marché de la dette extérieure des pays émergents se monte à moins de 300 milliards de dollars selon les indices de JPMorgan. Quant à la Réserve fédérale américaine (Fed), elle a déjà mis à disposition des lignes de swaps avec des pays comme la Hongrie, le Brésil, le Mexique ou la Corée afin de leur offrir suffisamment de liquidités en dollars. Relevons également que si, par le passé, les gouvernements de ces Etats n’hésitaient pas à «brûler» leurs réserves de change pour défendre les monnaies locales, ce n’est généralement plus le cas, sachant que des dévaluations mesurées sont synonymes de regain de compétitivité potentiel pour les industries exportatrices.
Mais si la dette émergente offre de manière générale des perspectives d’investissement attrayantes, on ne peut bien entendu exclure des déceptions spécifiques, à l’instar du défaut de paiement d’intérêts de l’Equateur en fin d’année dernière. Des scénarios catastrophe de plus grande ampleur, comme celui de la restructuration de la dette argentine en 2001, demeurent toutefois peu probables. Il n’en reste pas moins qu’une approche diversifiée des risques «pays» s’impose aujourd’hui également.
Une telle approche recèle un intérêt certain pour l’investisseur privé ou institutionnel doté d’une optique de placement internationale, car la dette émergente libellée en dollars offre une décorrélation vis-à-vis des autres classes d’actifs qui s’est à nouveau accentuée depuis le début 2009. Ce domaine d’investissement représente donc aujourd’hui un thème de placement à part entière et offre des opportunités de diversification de portefeuille des plus intéressantes. Certes, comme l’ensemble des placements à risque, la dette émergente libellée en dollars a connu un fort avis de tempête durant le dernier trimestre de 2008. Les différentiels de taux ont alors enregistré une importante hausse, qui a pu atteindre jusqu’à 900 points de base (pb) en moyenne, reflétant la prime de risque additionnelle pour ce type d’investissement. Depuis, les écarts de rendements (spreads) se sont stabilisés autour des 500 pb, niveau qui intègre encore d’importantes anticipations de taux de défaut. Voir graphique :
http://www.letemps.ch/Page/Uuid/896f6ac4-4323-11de-b8d1-5bf7dceb4670/
Etant donné les réserves de change accumulées dans la plupart de ces pays et le très important soutien des agences internationales, de telles anticipations ne sont pas près de se matérialiser, du moins pour les principaux pays émergents. D’ailleurs, l’amélioration des notes octroyées par les agences de notation à une majorité d’économies émergentes tendrait à le démontrer.
Sur un horizon de temps de douze à dix-huit mois, ces spreads élevés sont donc synonymes d’une asymétrie du risque à l’avantage de l’investisseur. D’une part, les rendements élevés des coupons offrent des perspectives de flux attrayantes et, d’autre part, les importantes décotes de certains titres par rapport à leurs pairs offrent un potentiel de gains en capital important. En effet, même si la reprise économique mondiale peut réserver quelques surprises – avec un réamorçage en «w» pour une sortie de crise accompagnée d’inflation fin 2010-début 2011 – elle n’en demeure pas moins tangible, contrairement à ce que pourraient laisser croire les niveaux de valorisation actuels de la dette émergente.
Enfin, l’engagement de nombreux pays émergents dans un processus de rachat de dettes extérieures en dollars, financé par des emprunts en monnaies locales, offre aux investisseurs deux arguments de placement supplémentaires. D’abord, celui d’un risque de défaut de remboursement des obligations gouvernementales libellées en dollars encore moins probable, en plus de l’assurance d’une demande soutenue pour la classe d’actifs. Puis, dans un contexte où la performance annualisée de la dette émergente libellée en dollars s’établit à +8,62% depuis fin 2001, une exposition renouvelée à cette classe d’actifs est donc d’autant plus recommandée qu’elle offre à la fois diversification et perspectives de rendements favorables.